À propos du métro de la métropole de Lille, l’heure – et c’est suffisamment rare être noté – est aux satisfecits. « Plus l’attente est longue, plus le plaisir est grand, a résumé le maire de Mons‐en‐Barœul, Rudy Elegeest, lors du dernier conseil métropolitain. Coutumier des bonnes formules, il a assuré n’avoir ressenti pareil plaisir « qu’à deux reprises en 25 ans ».
Ce qui l’émoustille à ce point – et les usagers réguliers du métro le comprendront aisément – c’est la commande de 57 nouvelles rames pour la ligne 2, synonyme, enfin, qu’une amélioration de la qualité de service est en vue. Alors qu’une vaste opération de com’ était organisée le 19 octobre en station Rihour afin d’annoncer la mise en service imminente des rames doublées sur la ligne 1, les bonnes nouvelles s’accumulent.
Délais de livraison des nouvelles rames, incertitudes sur la date de mise au rebut du matériel ancien, potentiels bugs du nouveau pilote automatique… plusieurs points incitent néanmoins à la prudence. Celles et ceux qui voyagent régulièrement en métro dans la métropole le savent : mieux vaut ne pas se réjouir trop vite, au risque de déchanter. Alors, fin de la galère ou pas ? On fait le point.
Ligne 2 : pour voir la situation s’améliorer il va encore falloir être patient
La qualité de service du métro est une question de pure arithmétique, liée au nombre de rames. Sortons la calculette : 83 rames de type VAL206 (mises en service au cours des années 1980) circulent actuellement sur la ligne 2 tandis que 38 d’entre elles devront être mises au rebut entre avril 2027 et février 2028. Pour les 45 autres, l’obsolescence aussi est proche, mais un plan de roulage adapté a été mis en place afin de les économiser au maximum, de sorte que leur date de mise au rebut est impossible à estimer précisément. Elles s’échelonneront jusqu’en 2030.
Pour remplacer l’ensemble de ces rames en fin de vie, la MEL peut s’appuyer sur deux leviers : le transfert de rames simples qui roulaient jusqu’ici sur la ligne 1 et l’achat de nouvelles rames.
Si le doublement de la ligne 1 est effectivement accompli pour février 2026, 27 rames pourront être progressivement transférées sur la ligne 2. Et, toujours si tout se fait selon le calendrier prévisionnel, quinze rames simples supplémentaires de la ligne 1 (soit 42 au total) pourront circuler sur la ligne 2 à compter de 2027.
Malgré ce transfert de 42 rames, ce sont toujours 41 unités qui manquent à l’appel pour compenser l’obsolescence annoncée des trains les plus anciens. C’est la raison pour laquelle la MEL a passé commande auprès de Siemens, de 57 rames de nouvelle génération pour un montant de 480 millions d’euros. La livraison des premières unités est attendue pour fin 2028, début 2029. L’ensemble de la commande doit être livrée d’ici 2031.
Une commande bien tardive
Cette présentation un tantinet complexe débouche sur une conclusion quant à elle très simple : tout retard dans les livraisons entraînerait directement une diminution de la fréquence de passages du métro sur la ligne 2. Puisque la date d’obsolescence des rames VAL206 était connue depuis l’origine, n’aurait-il pas été possible de davantage anticiper ?
Bien sûr que si. Comme l’a déjà raconté Mediacités, Siemens avait déjà approché dès 2019 les villes possédant des métros VAL afin d’envisager une commande groupée. Toulouse est allé au bout du processus et reçoit ces jours‐ci 15 nouvelles rames. Pas la MEL, qui a préféré attendre. En plus de placer ses usagers dans une position de grande vulnérabilité, cette décision de la métropole entraîne selon nos calculs un surcoût d’environ 40 millions d’euros.
« Je veux saluer le fait que nous soyons au rendez‐vous que nous nous étions donné », a préféré retenir le vice‐président Sébastien Leprêtre. Sauf que, là encore, c’est faux. Les nouvelles négociations avec Siemens pour obtenir que l’industriel fasse une place à la MEL dans un carnet de commande déjà saturé, ont duré plus d’un an. Ainsi, alors que l’objectif était de valider la commande fin 2024, ça n’a été le cas que le 17 octobre dernier.
Pourquoi les galères dans le métro lillois vont continuer en 2025 et au delà
Plusieurs élus dénoncent un manque d’ambition
« On adopte ce soir la délibération que je réclame depuis des années », a déclaré le conseiller communautaire écologiste Stéphane Baly. « Il est certain que nous aurions pu mieux faire, mais à présent, il est trop tard, a renchéri Rudy Elegeest pour le groupe d’opposition Ambition pour la métropole. Les usagers de la ligne 2 vont ressentir dans les mois et les années qui viennent une forme de déclassement. L’idée d’un métro de 1ère classe et d’un métro de seconde classe. »
En effet, alors que la ligne 1 du métro doit être très prochainement doublée, les usagers de la ligne 2 vont quant à eux devoir se montrer patients avant de voir les effets de la commande – tardive – de nouvelles rames. Pour les trois à quatre prochaines années, la situation restera peu ou prou la même. Jusqu’au tournant des années 2030, les nouveaux trains ne feront que compenser ceux qu’il aura fallu retirer. L’amélioration ne devrait intervenir qu’en 2031, avec une fréquence entre les rames qui pourrait atteindre 1’10 minutes en heure de pointe, contre 1’30 actuellement selon les annonces de Damien Castelain.
Dans un vœu présenté le 6 octobre dernier en conseil municipal, la candidate aux élections municipales de Tourcoing Katy Vuylsteker a ainsi considéré que l’achat de nouvelles rames n’apportait « ni saut qualitatif, ni augmentation significative de capacité ». L’élue écologiste à la Région souhaite que la MEL engage « sans délai » une réflexion en vue du doublement de la ligne 2.
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