En théorie, ça devrait aller vite. Lorsqu’une chambre disciplinaire de première instance (CDPI) de l’Ordre des médecins est saisie, elle dispose de deux mois pour trancher. Dans les Hauts‐de‐France, la CDPI parvient souvent à tenir les délais. Encore faut‐il qu’elle soit saisie rapidement et sans faille de procédure, notamment dans les affaires dites « MeToo Médecins ». En octobre 2024, deux affaires de soupçons d’agressions sexuelles « par personne abusant de son autorité » ont ainsi viré au fiasco. En partie rattrapées par la justice pénale. Mais ce n’est pas toujours le cas.
Nous sommes en juin 2024. Lors d’une consultation au cabinet d’un médecin, à Lille, une jeune femme se plaint d’une auscultation génitale qu’elle juge « inappropriée ». Selon elle, le docteur L. s’est livré à des allusions sexuelles avec, en prime, une invitation à dîner. Au total, la justice sera saisie de quatre plaintes de patientes envers ce médecin qui exerçait naguère au service des urgences de l’hôpital de Nouvion‐en‐Thiérache, dans l’Aisne.
Un hôpital où quatre anciennes collègues du docteur L. ne gardent pas un bon souvenir de l’urgentiste. Une aide soignante raconte des tentatives de baisers par surprise. Une infirmière s’émeut de subir du harcèlement sexuel… À l’époque, les faits ont été signalés auprès de la hiérarchie. Certains signalements datent d’une dizaine d’années. Tous sont restés lettre morte. « La seule réponse qu’a eue ma cliente, c’est qu’elle était trop souriante », déplore Margaux Machart, avocate d’une infirmière dont c’était le premier poste. Comme les autres, elle n’osera pas porter plainte auprès de la justice. « La peur de ne pas être crue », souligne Me Machart.
Aujourd’hui, les quatre femmes n’hésitent plus et dénoncent à leur tour le comportement du médecin. L’agence régionale de Santé (ARS) des Hauts‐de‐France saisit alors rapidement la juridiction disciplinaire (la CDPI) et le conseil de l’Ordre des médecins du Nord, qui sont deux instances indépendantes l’une de l’autre. Le médecin est suspendu cinq …