En séance plénière du conseil régional, Fabrice Pannekoucke, le remplaçant de Laurent Wauquiez à la tête de la collectivité, s’en est pris à notre journal suite à nos révélations sur son expérimentation de scanners corporels à l’entrée d’un lycée. Voici notre réponse.
Un élu de premier ordre qui insulte publiquement un journal d’information et qui se fait applaudir par une partie de son hémicycle. Non, nous ne sommes pas dans l’Amérique de Donald Trump, mais bien dans la région Auvergne‐Rhône‐Alpes de Laurent Wauquiez et de Fabrice Pannekoucke, ex et actuel présidents de la collectivité. Ce jeudi 16 octobre, le second a traité Mediacités de « torchon », au micro, en pleine assemblée plénière.
Ce dérapage – que nous condamnons vigoureusement – est inquiétant à plus d’un titre. Il l’est pour la qualité du débat public. Il l’est quant à la conception de Fabrice Pannekoucke d’une presse qui enquête et joue son rôle de contre‐pouvoir. Il l’est aussi dans la mesure où le président du conseil régional se moque d’une parole officielle : celle de la préfecture du Rhône.
Coup de com’
Qu’est-ce qui nous a valu cette insulte de l’élu savoyard ? Comme premier dossier soumis à l’assemblée plénière de la Région, qui se déroule ces 16 et 17 octobre, la majorité LR du conseil a mis à l’ordre du jour son projet d’expérimentation de brigades cynophiles dans les lycées, pour lutter contre le trafic de stupéfiants. Cette nouvelle incursion de la collectivité dans le champ sécuritaire (la sécurité, pour info, ne relève pas des compétences régionales) en rappelle une récente : en septembre dernier, la Région a testé l’usage de scanners à ondes millimétriques, comme ceux des aéroports, à l’entrée d’un lycée lyonnais. En présence de Fabrice Pannekoucke et de nombreuses caméras.
Le coup de com’ n’a duré qu’une demi‐journée mais il pose question. Comme Mediacités l’a raconté dans un article publié le 7 octobre dernier, la Région a installé ses portiques de sécurité avec scanners en dehors de tout cadre légal. La loi ne permet pas l’utilisation de tels équipements à l’entrée d’établissements scolaires et la collectivité n’a pas, comme elle aurait dû le faire, demandé une autorisation préalable – une dérogation – aux services de l’État. Ce que nous avait officiellement confirmé la préfecture du Rhône avant la publication de notre article.
Scanners à l’entrée d’un lycée de Lyon : le coup de com’ sécuritaire de la Région était illégal
« Si l’assertion de Mediacités est fausse, pourquoi n’y a‑t‐il pas eu de démenti ou de droit de réponse de votre part ? »
Ce jeudi 16 octobre, lors du débat sur les brigades cynophiles donc, le conseiller d’opposition Reynald Giacalone (PRG) revient sur l’expérimentation des scanners et cite nos révélations. « Nous avons été abasourdi de lire que, selon le journal Mediacités, votre récent test de scanners numériques n’aurait pas bénéficié, en amont, d’autorisation de la préfecture, ce qui l’aurait rendu illégal, souligne l’élu. Il conviendrait, M.le Président, que vous répondiez à cette assertion de Mediacités. Soit elle est fausse et dans ce cas pourquoi n’y a‑t‐il pas eu de démenti ou de droit de réponse de votre part ? Soit elle est exacte et ce serait donc la confirmation que la Région, pour mener à bien des actions en matière de sécurité, est capable d’être hors‐la‐loi. »
La réponse arrive quelques minutes plus tard. « Je vous remercie, déclare Fabrice Pannekoucke en s’adressant à Reynald Giacalone, d’avoir à plusieurs reprises posé cette question de ce torchon de Mediacités auquel je n’ai pas pris la peine de répondre. Tout simplement parce que si je devais passer mon énergie à répondre à tous les torchons qui sont commis tout au long de l’année c’est autant d’énergie que je ne mettrais pas au bénéfice des habitants de notre belle région. » Applaudissements de ses troupes.
Et sur le fond ? « C’était non seulement légal mais aussi concerté avec le rectorat », assène le patron du conseil régional. Avant de se féliciter de la fluidité qu’aurait démontré l’expérimentation devant le lycée lyonnais.
« Concerté avec le rectorat » peut‐être, mais sans autorisation préalable de la préfecture. C’est justement l’élément central de notre article du 7 octobre, repris par l’opposant Reynald Giacalone dans sa question et sur lequel Fabrice Pannekoucke a choisi de ne pas répondre. Ou de répondre à côté. Et pour cause : Mediacités maintient l’intégralité de ses informations et constate qu’en assénant que son expérimentation était légale, le président de la Région remet en cause la parole de l’État.
Plus haute juridiction administrative
Ce n’est malheureusement pas la première fois que le remplaçant de Laurent Wauquiez se joue des règles légales. Le 23 juillet dernier, le Conseil d’État a ainsi rendu une décision qui enjoint le président de la région Auvergne‐Rhône‐Alpes à communiquer à Mediacités les notes de frais de ses élus, comme le permet la loi.
Si vous n’avez pas suivi ce feuilleton, depuis 2021, nous demandons à la collectivité de se montrer transparente sur ces dépenses. Devant son refus, nous avons saisi le tribunal administratif qui nous a donné raison, avant que la Région porte l’affaire devant le Conseil d’État, qui nous a de nouveau donné raison.
Notes de frais de Laurent Wauquiez : le Conseil d’Etat donne raison à Mediacités
Or, depuis ce 23 juillet 2025 et malgré des relances et un courrier en bonne et due forme adressé à Fabrice Pannekoucke, celui‐ci ne nous a toujours pas transmis les fameuses notes de frais. Autrement dit, le président de la Région s’assoit sur une décision de la plus haute juridiction administrative de notre pays.
Résultat, nous avons tout récemment déposé, auprès du tribunal administratif de Lyon, une demande d’exécution d’une décision de justice, afin que Fabrice Pannekoucke respecte non seulement la loi mais aussi la justice. Les « torchons » peuvent parfois se montrer opiniâtres. Et bien utiles pour nettoyer un peu la démocratie locale.
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