Municipales ou métropolitaine ? « Ils n’ont qu’à faire comme tout le monde ces Lyonnais ! »

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En mars, les électeurs du Grand Lyon voteront pour choisir leur maire... et leur président de Métropole. Ici, le siège du Grand Lyon. Photo : N.Barriquand/Mediacités.

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Par Nicolas Barriquand

En mars prochain, se tiendront les élections municipales mais pas que. Dans le Grand Lyon, les électeurs voteront aussi au scrutin métropolitain. Problème de journalistes : comment désigner l’échéance – que tout le monde appelle déjà « municipales » – en tenant compte de cette spécificité lyonnaise ?

Avec ses couleurs pastels bleu et rouge et son urne électorale stylisée, il paraît si inoffensif… Ne pas s’y fier ! Le logo « Municipales 2020 » qui a fait son apparition ces dernières semaines dans les pages de Mediacités – il accompagne tous les articles consacrés aux élections de mars 2020, notamment ceux de « L’Oeil des municipales », nos réponses sur la plateforme de vérification Véracités ou encore notre « Manifeste pour une démocratie locale réelle » – est à l’origine d’un débat fiévreux au sein de la rédaction. J’exagère à peine…

En cause ? L’exception lyonnaise. A priori, cela n’a pas échappé à nos lecteurs, a fortiori lyonnais : les 15 et 22 mars prochains, les habitants de la Métropole de Lyon seront invités à voter deux fois lors de chaque tour. Une fois pour choisir leur maire – comme partout ailleurs – ; une fois pour le président du Grand Lyon et les 149 autres conseillers métropolitains. Un scrutin inédit et unique en France qui découle de la création, en 2015, de la Métropole de Lyon, collectivité elle aussi inédite et unique. Pour faire le tour de cette élection métropolitaine, je vous conseille la lecture de cette « foire aux questions » concoctée maison ou de cette passionnante interview du politologue Gilles Pinson : « Élection directe du Grand Lyon : « En 2020, le huis clos entre élus volera en éclats » ».

« On ne peut pas utiliser ce logo estampillé « Municipales 2020 » »

Mais revenons à nos discussions internes. Mediacités est un journal « multi‐local », implanté dans quatre agglomérations. Pour mes collègues qui couvrent Lille, Toulouse et Nantes, les élections de mars 2020 se résument aux municipales. Contrairement à Lyon donc. Or, comment désigner l’échéance à venir sur Mediacités ? « On ne peut pas utiliser ce logo estampillé « Municipales 2020 » », ai‐je d’abord lancé innocemment avec ma casquette de rédac‐chef de l’édition lyonnaise. « Comment cela ?, m’a répondu Yves, qui chapeaute les évolutions techniques du site, un trait de panique dans la voix. Mais toutes les nouvelles rubriques ont été développées, reliées entre elles, et « habillées »  avec le mot « Municipales » ! »

Boum, le problème était sur la table. Et pas si anodin que cela… Depuis sa création, Mediacités ne s’en tient pas aux mairies mais se penche aussi sur les affaires de nos métropoles. Ces instances, souvent obscures aux yeux des citoyens, concentrent de plus en plus de compétences (l’urbanisme, les déplacements, les politiques liées à l’environnement, etc.). Qui plus est à Lyon, où la Métropole a absorbé sur son territoire les prérogatives du département (collèges, aide sociale, etc.). Si l’apparence du pouvoir demeure dans le prestigieux hôtel de ville qui domine la place des Terreaux, sa réalité se trouve aujourd’hui au siège du Grand Lyon, un cube de verre et de béton qui passe inaperçu dans le quartier de la Part‐Dieu. Rien d’étonnant à voir Gérard Collomb se battre pour re‐devenir patron de la Métropole au détriment de son poste de maire (après mars 2020, la loi interdira de cumuler les deux mandats).

Le problème du référencement

Peut‐on alors appeler « Municipales 2020 », sur Mediacités, l’échéance à venir ? « Ça ferait un bon article La Fabrique : la lutte pied‐à‐pied des Lyonnais pour faire reconnaître leur spécificité électorale face aux tenants du y‑zon-qu’à‑faire-comme-tout-le-monde-ces-snobs-de-Lyonnais », balançait, taquin et prémonitoire, un membre de l’équipe dont je tairais le nom. Renommer l’ensemble de notre couverture « Élections locales 2020 » ou « Élections 2020 » ? Mouais… La perspective n’enchante pas vraiment les comparses de Lille, Toulouse et Nantes : « On serait les seuls à le faire ». 

Elle soulève aussi un autre problème, qui nous dépasse, celui du référencement sur le web. Au fur et à mesure que s’approchera le scrutin, les moteurs de recherche, Google en tête, focaliseront sur le mot « Municipales ». Autrement dit, un potentiel lecteur qui souhaite s’informer sur les élections à Roubaix ou à Rezé (en banlieue de Nantes) en tapant dans sa barre de recherches « municipales » aurait bien peu de chance de tomber sur nos articles s’ils étaient labellisés « Élections locales 2020 ».

« Considérer que le mot « Municipales » englobe l’ensemble de la séquence électorale ? »

Pierre, notre responsable de la relation aux lecteurs, a alors bricolé un logo sur lequel, autour de l’urne, on peut lire « municipales 2020 » mais aussi « métropolitaine 2020 ». Grâce lui soit rendue ! Cette adaptation sera utilisée pour des articles lyonnais mais elle ne résout pas le casse‐tête pour les contenus communs à l’ensemble de nos villes. Exemple en décembre, quand il a fallu titrer l’article d’introduction de notre enquête collaborative sur la gentrification. Formule retenue : « Municipales 2020 : et si on parlait de la gentrification ? ». J’avais plaidé, vous vous en doutez, pour « Elections 2020 », l’enjeu relevant d’ailleurs autant, si ce n’est plus, des prérogatives des métropoles que des villes. En vain.

« Ne peut‐on pas considérer que le mot « Municipales » englobe l’ensemble de la séquence électorale et donc le scrutin particulier du Grand Lyon ? », suggère Yves. On peut. De fait, aucun média national ne s’encombrera de nuances à cause de l’exception lyonnaise. Mais Mediacités étant à la fois national et local, la solution ne me paraît qu’à moitié satisfaisante. Elle laisse penser que les enjeux de notre vie quotidienne (les transports, la pollution, le logement…) restent à l’échelle des communes alors que ce n’est pas le cas. Surtout, elle ne permet pas de rendre lisible la future élection du Grand Lyon, pourtant hautement stratégique. 

La mesure #1 de notre Manifeste pour une démocratie locale réelle propose de « généraliser l’élection directe des élus intercommunaux afin que les citoyens votent pour ceux qui exercent l’essentiel du pouvoir local ». Accessoirement, une telle réforme permettrait de résoudre nos débats internes sémantiques !

  • Petit rappel : depuis le scrutin de 2014 (loi electorale du 27 mai 2013) les « municipales » sont en même temps communales ET intercommunales puisque sur le même bulletin de vote figurent une liste communale et une liste intercommunale (pour les communes de plus de 1000 habitants). Le cas de Lyon est par contre effectivement différent, mais la question de la dénomination « municipales » vaut pour tous et la désignation « municipales » est donc bien erronée depuis 2014, on devrait parler des elections « communales et intercommunales ».