Ariane Lavrilleux en garde à vue : « Nous, jeunes journalistes, voulons continuer à informer librement »

Procédures bâillons, violation du secret des sources, arrestations de journalistes dans le cadre de leur travail : face à ces atteintes, une centaine de rédacteurs, solidaires de leur consœur de Disclose placée en garde à vue cette semaine, exhortent les autorités à défendre la liberté de la presse à l’approche des Etats généraux de l’information. Mediacités publie leur tribune, aussi diffusée par Libération.

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Illustration : Jean-Paul Van Der Elst.

Nous, jeunes journalistes, voulons dire notre inquiétude sur notre capacité de pouvoir continuer à vous informer librement, demain, en France. Continuerons‐nous d’enquêter sur des scandales d’Etat, en sachant que l’un·e des nôtres peut terminer en garde à vue pour avoir fait son travail, informer ?

Notre collectif se tient solidaire de notre consœur Ariane Lavrilleux, journaliste de Disclose, arrêtée, perquisitionnée et placée en garde à vue mardi 19 septembre. A elle et à son média, nous souhaitons exprimer tout notre soutien et notre solidarité inébranlable. D’après le média qui l’emploie, les enquêteurs de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) lui reprochent d’avoir signé depuis 2019 cinq articles sur les ventes d’armes françaises à l’étranger, et notamment des informations d’intérêt public sur des armes fabriquées en France, puis retournées contre des populations civiles dans le monde.

Nous exprimons notre profonde préoccupation suite à une série d’événements qui ont secoué notre profession et menacé le droit à l’information du citoyen en France. Avec sidération, nous avons constaté ces derniers mois la multiplication des atteintes à la liberté de la presse, visant particulièrement des médias d’investigation, attachés à leur rôle crucial de contre‐pouvoir.

Procédures bâillons (Complément d’enquête, MediacitésStreetPress), violation du secret des sources (Le Poulpe), censure préventive (Mediapart, Reflets), arrestations de journalistes dans le cadre de leur travail, violences physiques et verbales, menaces de mort (Morgane Large pour Splann ! et Radio Kreiz Breizh), la liste est longue… Ne nous voilà pas rassuré.e.s !

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Le principe de la liberté de la presse menacé

La liberté de la presse est l’un des piliers fondamentaux d’une société démocratique. En tant que journalistes, en tant que générations de demain, nous y sommes profondément attaché·e·s, et inquiet·e·s de voir ce principe essentiel aujourd’hui menacé.

Nous alertons le gouvernement, qui doit lancer prochainement les Etats généraux de l’information promis par le président de la République, sur la détérioration de nos conditions de travail. Notre mission d’information est exigeante. Elle nous oblige à l’égard de celles et ceux que nous informons chaque jour. Mais nous sera‐t‐il encore possible demain de l’exercer librement en France ?

L’intimidation n’a pas sa place dans notre société. Nous exhortons les autorités politiques, policières et judiciaires à respecter et à protéger la liberté de la presse, à garantir la sécurité des journalistes dans l’exercice de leur travail, et à veiller à ce que la transparence et la responsabilité restent au cœur de notre démocratie. Nous refusons de nous laisser intimider et de permettre que notre voix soit réduite au silence.

En conclusion, nous appelons à l’unité de la communauté journalistique et à une solidarité sans faille envers nos collègues. La défense de la liberté de la presse est une responsabilité citoyenne et collective. Nous sommes déterminé·e·s à préserver cet héritage précieux du XIXe siècle pour les générations futures. Notre plume ne fléchira pas. Car informer n’est pas un délit.

Les signataires : Louis Pasquier 25 ans, journaliste à Premières Lignes Hugo Coignard 25 ans, journaliste indépendant Agathe Kupfer 24 ans, journaliste pigiste Aouregan Texier 23 ans, journaliste à La Dépêche du Midi Clémence Blanche 24 ans, journaliste à La Croix Daphné Deschamps 25 ans, journaliste à StreetPress, Politis, OffInvestigation Elisa Hessabi 21 ans, journaliste pigiste Embarek Foufa 23 ans, journaliste à Politis Floréane Marinier 27 ans, journaliste pigiste Léo Lefrançois 26 ans, journaliste indépendant Lisa Gamonet 28 ans, journaliste pigiste Lucas Martin‐Brodzicki 27 ans, journaliste pigiste Marie‐Aimée Copleutre 25 ans, journaliste à BFM TV Marine Corbel 24 ans, journaliste pigiste Quentin Meunier 26 ans, journaliste à 20 Minutes Romain Michelot 25 ans, journaliste à Arte et à France Télévisions Scott Dubois 21 ans, journaliste pigiste Solenn Marcoux 23 ans, journaliste à Factstory William Minh Hào Nguyen 26 ans, journaliste pigiste Zeina Kovacs 25 ans, journaliste à Mediapart

La liste des 117 jeunes journalistes à retrouver ici.

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Par Un collectif de jeunes journalistes