Loi immigration : la métropole de Lyon peut‐elle refuser de l’appliquer en partie ?

Metropole de Lyon
Le siège de la Métropole de Lyon, dans le 3e arrondissement de Lyon. Photo : N.Barriquand/Mediacités.

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Par Hugo Coignard / Enketo

Avec une trentaine de conseils départementaux, le Grand Lyon a annoncé vouloir s'opposer à l'application d'une disposition du texte voté à l'Assemblée nationale. Depuis, la collectivité temporise…

Question de Nicolas à Mediacités : « Des collectivités, dont le Grand Lyon, ont dit vouloir s’opposer à la loi immigration concernant certaines aides sociales. Est‐ce techniquement possible ? » 

Bonjour et merci pour votre question,

En effet, à peine a‑t‐elle été définitivement adoptée par l’Assemblée nationale le 19 décembre dernier que la loi immigration était contestée par des collectivités dès le lendemain. Trente‐deux départements dirigés par la gauche (Parti socialiste, PRG, Les Écologistes et divers gauche) — dont la métropole de Lyon, qui exerce aussi les compétences d’un conseil départemental sur son territoire — ont annoncé vouloir s’opposer à la mise en œuvre d’une partie de la loi concernant l’aide d’autonomie des étrangers. Elle instaure, selon eux, une « préférence nationale ».

« Nous, présidentes et présidents de départements de gauche, refusons l’application du volet concernant l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) de cette loi inspirée par l’extrême droite, portée par un exécutif qui prétendait incarner la modération et qui n’est désormais plus que l’illustration de la compromission », revendiquaient les présidentes et présidents de ces départements dans un communiqué publié sur X (ex‐Twitter). La distribution de cette aide à ses bénéficiaires est une compétence que l’Etat a confié aux conseils départementaux.

Comme d’autres allocations, l’accès à l’APA — qui permet à une personne en perte d’autonomie de 60 ans ou plus de couvrir ses dépenses pour son maintien à domicile — a été restreint par la nouvelle loi immigration. Les étrangers non européens en situation régulière devront dorénavant justifier de cinq ans de résidence en France ou avoir travaillé au minimum trente mois en France pour prétendre à cette aide. 

Contourner la loi ? 

La métropole de Lyon (avec les 31 autres départements) peut‐elle faire fi d’une partie de la loi ? Juridiquement, non. « Les collectivités n’ont pas la possibilité de refuser d’appliquer une loi », confirme Olivier Dupéron, professeur de droit public à l’université de Reims, à nos confrères du Parisien.

Mais si un département ne peut pas refuser d’appliquer la loi portée par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, il peut être tenté de la contourner. Les départements ont en effet la possibilité de créer leurs propres aides sociales spécifiques, alimentées par leurs budgets, en plus de celles imposées par la loi. C’est le cas par exemple du « RSA Jeunes », instauré en 2021 par la majorité du Grand Lyon.

Pour court‐circuiter les restrictions de la loi immigration sur l’APA, certains départements, à l’instar du Lot, ne cachent pas leur intention de créer une nouvelle aide pour les personnes qui seront exclues du dispositif. Son président socialiste Serge Rigal « proposera, à la prochaine Assemblée départementale, de créer une nouvelle allocation d’autonomie universelle qui donnera exactement les mêmes droits aux Lotois qui seraient exclus par cette loi », promet le département sur son site internet.

« On ne va pas se mettre hors‐la‐loi » 

La métropole de Lyon songe‐t‐elle à monter un tel dispositif compensatoire ? « C’est beaucoup trop tôt pour y réfléchir », rétorque à Mediacités le cabinet du président Bruno Bernard. « On attend d’abord la décision du Conseil constitutionnel [qui pourrait censurer, le 25 janvier, certains passages du texte législatif]. Notre participation à ce communiqué [signé avec les 31 autres départements] était une façon de dire que la Métropole refuse cet aspect de la loi. »

Pour une collectivité, contourner la loi n’est pas sans risques puisque les préfets peuvent saisir les tribunaux administratifs s’ils estiment que ces allocations compensatoires ne sont pas conformes à la législation, souligne CheckNews. « Ce qui est certain, c’est que le Grand Lyon ne va pas se mettre hors‐la‐loi, affirme la Métropole. Selon le chemin que prendra la loi prochainement, nous aviserons. »

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