Coronavirus : avec le confinement, la pollution diminue‐t‐elle à Nantes ?

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Image d'illustration / CC - Leigh Mellet

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Par Romain Bizeul

Le confinement et la baisse de l'activité économique améliorent-ils la qualité de l'air à Nantes, nous demande l'une de nos lectrices. Oui, un peu, mais tout dépend de ce que l'on mesure.

Question d’Isabelle : En cette période de confinement et de baisse d’activité, on a pu observer une baisse de la pollution dans les diverses régions du monde touchées. Pouvons‐nous en dire de même en France et à Nantes particulièrement ?

Bonjour,

Comme vous l’avez fait remarquer, les mesures de confinement liées à la pandémie du Covid‐19, ont donné lieu à une baisse de la pollution dans les pays les plus touchés, comme par exemple en Chine. Indéniablement, la baisse d’activité liée aux mesures sanitaires contribue à ce phénomène. C’est le cas également en France où la qualité de l’air s’améliore à mesure que le confinement perdure. L’association Air Pays de la Loire, qui surveille la qualité de l’air dans la région a publié, le 23 mars, ses premières mesures après une semaine de confinement.

On y observe notamment une forte baisse de la présence de dioxyde d’azote sur le poste de mesure du boulevard Victor Hugo à Nantes, point où la pollution de l’air liée à la circulation est d’ordinaire très forte. « Ici, la baisse de circulation influe directement sur la présence du dioxyde d’azote dans l’air, une molécule impactant directement la santé des gens typique du transport routier », explique Marion Guiter, ingénieure d’études à Air Pays de la Loire.Selon les données de Nantes Métropole, une baisse de 74 % du trafic routier est observée depuis le début de la période de confinement. Pour autant, la présence de dioxyde d’azote ne baisse presque pas quand il est mesuré près de stations volontairement placées loin des axes de communications mais toujours dans la ville.

Si la diminution du trafic routier semble directement influer sur la qualité de l’air, Air Pays de la Loire nuance toutefois ses données. Les particules fines, en effet, ont été mesurées à la hausse pendant cette première semaine de confinement. « La météo très clémente durant cette période n’a pas du tout aidé à la dispersion des particules fines », prévient Marion Guiter. Le beau temps provoqué par l’anticyclone n’a fait que retenir ces molécules créant des « conditions typiques d’un épisode de pollution ».

Dans un premier bilan publié le 26 mars, Air Pays de la Loire estime par ailleurs l’impact qu’aurait cette période de confinement sans cette météo défavorable à la qualité de l’air. En prenant soin de rappeler qu’il ne s’agit que simplement d’un ordre de grandeur établis dans une période trop courte pour en tirer de réelles conclusions, l’association évalue la diminution de dioxyde d’azote à environ 70 % et près de 50 % pour les particules fines sur le site du boulevard Victor Hugo. Pour les points de mesures placés loin du trafic routier la baisse serait moins importante, avoisinant les 25 % pour le dioxyde d’azote tandis que les particules fines seraient en baisse de 10 %.

Des chiffres que confirment le second bilan dévoilé par Air Pays de la Loire, le 1er avril. L’association considère que « le respect des règles par la population est globalement effectif à partir de la deuxième semaine. » Ce qui se traduit par une amélioration générale de la qualité de l’air, notamment aux points de contrôles d’ordinaire impactés par la circulation automobile. « À partir du 28 mars, la pollution au dioxyde d’azote en bordure du boulevard Victor Hugo à Nantes (axe routier habituellement très fréquenté) est équivalente à celle observée en secteur rural », précise ce second bilan. Ainsi, selon ses calculs, Air Pays de la Loire estime que la présence de dioxyde d’azote à cet endroit est en baisse de 84 % par rapport à ce qui pourrait être observé en temps normal. Soit 17 points de plus que la première semaine. Concernant les particules fines, l’association observe également une diminution de la pollution de l’air, mais moins impressionnante : – 51 % en deuxième semaine de confinement et – 47 % en première.

À l’heure de son troisième rapport du 8 avril, Air Pays de la Loire constate une stabilisation de la qualité de l’air à Nantes. Après 21 jours de confinement et de baisse générale de l’activité, l’association estime la diminution de la pollution en zone urbaine du même ordre que celle observée au cours de la deuxième semaine. Seul point noir : une forte hausse de la présence de dioxyde d’azote près du boulevard Victor Hugo a été relevée le 3 mars. Une augmentation causée par la « forte inversion de température ce jour‐là qui a bloqué les polluants au sol », selon Air Pays de la Loire.

Attention à la qualité de l’air domestique

Toujours selon Air Pays de la Loire, en plus des conditions météorologiques, s’ajoutent l’activité agricole intensifiée par les bonnes conditions météorologiques ainsi que des masses d’air venant d’Afrique ayant apporté des poussières du Sahara. Mais pas seulement. Les mesures de confinement ont, paradoxalement, pu intensifier ce phénomène. « Quand on est plus chez soi, on chauffe plus, explique Marion Guiter, ce qui a une incidence sur la qualité de l’air. » De petits effets néfastes qui, malgré tout, restent contenus par la baisse d’activité générale qu’entraînent les mesures sanitaires prises par le gouvernement.

Dans son rapport portant sur la deuxième semaine de confinement, entre le 23 et le 30 mars, Air Pays de la Loire constate, par ailleurs, que la pollution aux particules fines augmente fortement, et pointe un pic au 28 mars. Comme le montrent les données, la suspension du trafic automobile n’a que peu d’impact sur ce type de pollution, provoqué avant tout par l’activité agricole et le chauffage au bois. Dans ses conclusions du 8 avril portant sur la troisième semaine de confinement, l’association qui surveille la qualité de l’air en Pays de la Loire explique ce pic de particules fines par des vents venus d’Europe centrale. Un épisode de pollution qui s’est terminé dès le lendemain grâce à l’évolution des conditions climatiques.

Une autre réserve : cette période de confinement peut, plus qu’à l’accoutumée, inciter à se lancer dans de grands travaux de nettoyage ou de bricolage. Or ceux‐ci peuvent nuire à la qualité de l’air… à l’intérieur du domicile. Air Pays de la Loire met en garde sur l’utilisation des produits ménagers : « Il faut bien penser à aérer son domicile, au moins deux fois par jour, afin d’éviter toute pollution de l’air intérieur. » Pensez‑y quand, par ennui, vous repeindrez vos murs !

Romain Bizeul

» Mise à jour du 1er avril 2020 : insertion de deux paragraphes concernant le bilan établi par Air Pays de la Loire pour la deuxième semaine de confinement.

» Mise à jour du 8 avril 2020 : insertion d’un paragraphe et de quelques lignes concernant le bilan établi par Air Pays de la Loire pour la troisième semaine de confinement.

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